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ERBRAY  AUTREFOIS  -  Période 1789-1880

 

Les événements de l'année 1789 faisaient l'objet de commentaires libres soit dans les auberges soit dans les fermes, mais seulement lorsque l'on se retrouvait entre gens sûrs.

Depuis la rédaction du cahier de doléances dans lequel les seigneurs avaient été ouvertement mis en cause, il existait un certain malaise. On s'attendait à des réactions dans un sens ou dans l'autre ; c'est pourquoi l'on observait une certaine discrétion. Il semble toutefois que la majorité des habitants étaient ouverts aux idées nouvelles.

Début 1790, un décret du 13 janvier divisa le territoire national en 83 départements, chaque département en districts et chaque district en cantons et communes. De la sorte, la commune d'Erbray fut rattachée au canton de St-Julien de Vouvantes et au district de Chateaubriant.

 Chaque commune devait être administrée par un maire, ou un corps municipal, désigné par une assemblée élue. Pour participer à l'élection de cette assemblée, il fallait être "citoyen actif, c'est à dire avoir payé un impôt appelé le cens. De ce fait, en 1790, seuls 184 citoyens actifs prirent part aux élections, soit 10 à 11 % de la population erbréenne.

 En juillet de la même année 1790, fut votée par l'Assemblée Constituante, la constitution civile du clergé qui entraîna la confiscation des biens de l'Eglise par l'Etat lequel proposa d'en réserver une certaine partie à la rétribution des évêques et des curés. (V. annexe I)

 Le 27 novembre 1790, le serment d'allégeance à cette constitution fut imposé à tous les ecclésiastiques. Le Pape ayant alors condamné la Constitution civile du clergé, bon nombre de prêtres de la région entre autres, le curé d'Erbray Jacques GRIGNE et son vicaire l'abbé DURONSSEUR, refusèrent de prêter ce Serment.

 La même année 90 vit la suppression des fouages qui étaient des redevances attachées à chaque foyer. Ces fouages étaient désormais remplacés par l'impôt foncier. Toutefois l'imposition des fouages en Cours devait être encaissée, c'est pourquoi le 11 avril 1791 la municipalité d'Erbray se vit réclamer par le receveur principal des fouages, une somme de 298 livres dont elle tardait à s'acquitter.

 Selon la constitution civile du clergé, les curés devaient être élus. Le curé d'Erbray Jacques GRIGNE, s'étant insurgé contre cette mesure, l'assemblée électorale du district nomma un prêtre de Derval qui par lettre du 4 avril 1791, tout en remerciant ses électeurs déclinait l'offre qui lui était faite la soumettant au préalable à la ratification du Ciel. Cette réponse ne donna sans doute pas satisfaction à la dite assemblée car elle nomma alors au poste de curé constitutionnel d'Erbray : Joseph Marie MARTEAU, natif de St-Germain près de Rennes.

 Avant que ce nouveau curé assermenté n'arrive à son poste, un nommé GUIBOURG-DUPIN originaire d'Erbray et propriétaire des fermes du "Pin" fut arrêté le 23 juin 91 à Chateaubriant où il habitait. Mais il recouvra sa liberté quelques jours plus tard.

 Ce fut le 24 juillet 1791 que Joseph Marie MARTEAU arriva à Erbray pour y exercer ses fonctions de curé de la Nation.

Jacques GRIGNE le curé en titre ne voulut pas lui remettre la boîte contenant les saintes Huiles et par la suite il se maintint plus ou moins clandestinement dans sa paroisse ce qui provoqua dès le 12 septembre de la part du curé constitutionnel, une longue lettre adressée aux administrateurs du district (Annexe II).

Dans cette lettre, il exprime sa déception en face du peu de zèle de ses ouailles, fait état de menaces proférées à son endroit, jusque dans son domicile en présence de témoins favorables à sa cause et dont il donne les noms. Il y établit aussi l'identité de ses agresseurs et signale en outre dans le bourg la présence de bon nombre de gens hostiles à son action. Il conclut en incitant les administrateurs du Directoire du district à prendre des mesures d'urgence.

 Courant juillet 1791, un décret ordonna à tous ceux qui avaient quitté le territoire national de rentrer dans un délai de deux mois, faute de quoi ils seraient considérés comme émigrés et en conséquence leurs biens seraient confisqués au profit de la Nation.

 Vers la mi-septembre, le nouveau curé MARTEAU s'était plaint près du maire Pierre BOUCHET que par ses discours, Jeanne MOREAU de la Moussais, au service de l'ancien curé dont elle gardait les meubles entreposés chez elle, éloignait de l'église des personnes pourtant bien disposées à assister aux offices.

A la suite de cette plainte, Jeanne MOREAU fut arrêtée par la garde nationale d'Erbray et conduite à la maison d'arrêt de Chateaubriant le 18 septembre 1791. Aucun fait circonstancié n'ayant été relevé contre elle, ni aucune preuve n'ayant été apportée à sa charge, elle fut libérée dès le 21 septembre (Annexe III).

Le curé MARTEAU en butte à l'hostilité d'une partie notable de la population était souvent amené à faire appel aux administrateurs du district. C'est ainsi que dans une nouvelle lettre du 12 octobre 1791, il cite un témoin qui dépose en sa faveur.

 Jeanne MOREAU ayant été de nouveau arrêtée, l'ancien curé Jacques GRIGNE porta plainte, lui aussi, auprès des administrateurs du District. Il en résulta après enquête un jugement global qui fut rendu en ces termes :

"Vu la requête du Sieur GRIGNE ex-curé de la paroisse d'Erbray, relative à la gardienne de ses meubles, communiquée au District de Chateaubriant le 27 septembre dernier. Outre le communiqué de la Municipalité d'Erbray du 5 octobre, de ses observations du 13, de la copie de sa nouvelle délibération.

D'une lettre signée J-M. MARTEAU curé constitutionnel d'Erbray du 12 octobre, et l'avis du District de Chateaubriant.

LE DIRECTOIRE, OUI le procureur général syndic, approuve le dépôt fait ou à faire par le procureur syndic du District de Chateaubriant, de la lettre du Sieur MARTEAU curé constitutionnel d'Erbray au greffe criminel du Tribunal du District, pour servir l'accusateur public près le même Tribunal, de dénonciation des faits y contenus, d'indication de témoins et pour être par ce dernier fait toutes poursuites nécessaires, conformément à la loi du 28 juin dernier et autres lois sur cette matière.

Au surplus, attendu les troubles occasionnés dans la paroisse d'Erbray par la présence du Sieur GRIGNE cy-devant curé de cette paroisse, par le discours qu'il est accusé d'y tenir, ce qui a forcé la Municipalité du lieu à s'assurer de sa personne.

Attendu même que son prétexte de demeurer à la garde de ses meubles dudit GRIGNE, sa servante y excite beaucoup de rumeur et de fermentations.

 LE DIRECTOIRE ARRETE; qu'en exécution de son délibéré du 6 juin dernier le Sieur GRIGNE actuellement remplacé dans sa cure par défaut de prestation de serment sera tenu d'en sortir, et de s'en tenir éloigné au moins à la distance de trois lieues, ainsi que d'en faire enlever ses meubles et effets, afin de n'avoir aucun prétexte d'y revenir, à faute de quoi, il y sera contraint par la force armée, sur réquisition de la Municipalité et à son défaut sur celle du Directoire du District qui en dresseront procès-verbal, si le cas y échet.

Finalement fait défense au Sieur GRIGNE de se dire qualifier curé d'Erbray, improuve cette qualification prise dans sa requête du 27 septembre dernier, laquelle à cette fin demeure supprimée.

 

ORDRE AU SIEUR GRIGNE D'EVACUER LA CURE.

Vu l'expédition du procès-verbal rapporté le 21 de ce mois par les Maires et officiers municipaux procureur de la commune d'Erbray contre le Sieur GRIGNE curé réfractaire de ladite paroisse, du District de Chateaubriant du lendemain.

LE DIRECTOIRE, OUI le procureur syndic approuve la délibération du District de Chateaubriant du 22 juillet 1791 et arrête qu'elle sera exécutée contre le Sieur GRIGNE ex-curé d'Erbray, suivant sa forme et sa teneur.

 Les termes de ce jugement nous montrent clairement que la Municipalité issue de la Révolution soutient logiquement le curé constitutionnel contre le curé réfractaire. Mais d'autre part la lecture des annexes nous fait apparaître que les paroissiens d'Erbray sont profondément divisés entre fidèles de l'ancien curé et partisans du nouveau.

 Toutes ces péripéties locales étaient la répercussion de ce qui se passait tant à l'échelon national qu'à l'échelon régional.

Ainsi le 30 août 1791, le DIRECTOIRE du département avait autorisé la descente des cloches dans les églises du District de Chateaubriant. Et l'Assemblée Législative ayant remplacé la Constituante le 1er octobre 1791, renouvela le 29 du même mois et malgré le veto du Roi, l'obligation faite aux prêtres de prêter le serment civique ; deux jours plus tard le 31 elle déclara les émigrés, suspects de conspiration contre la patrie.

 Les archives municipales d'Erbray, à la date du 5 janvier 92 nous mentionnent une lettre du curé J-M. MARTEAU, dans laquelle, il exprime sa profonde déception et son regret d'avoir accepté la cure d'Erbray; en voici la teneur :

"Le 24 juillet 1791, l'an trois de la liberté, j'ai été installé curé constitutionnel de cette paroisse, quoique né à St-Germain de Rennes et ayant milité dix-huit ans dans le diocèse comme vicaire et prédicateur, au moment où je ne m'y attendais pas et en me croyant absolument inconnu dans le pays, je fus cependant nommé par Messieurs les Electeurs de Chateaubriant pour curé d'Erbray J'étais alors vicaire de Baye district de la Guerche département

d'Isle et Vilaine, quoique désiré dans mon pays comme un …. j'acceptais sans connaître la place qui m'était proposée, je ne fus pas longtemps sans me repentir de ma sottise, je me trouvais en effet plongé dans la plus affreuse solitude, point de société, point d'union, peu d'amis de la chose publique, mon prédécesseur grand fanatique et réfractaire ne cesse de venir dans la paroisse et de semer partout l'esprit d'insubordination et de désobéissance à la loi et d'Aristocratie, il a tourné toutes les têtes. Malgré mes exhortations personne n'assiste aux offices, cela me désole, aussi au mois de décembre dernier ai-je fait tous mes efforts pour quitter. J'ai travaillé en vain, je n'abandonne cependant pas mon projet, je me déplais trop icy et je promets et j'atteste que j'aimerais mieux vilconnier que rester, j'attends tout des circonstances, j'espère qu'elles me favoriseront.

Le plus tôt sera le meilleur.

J-M. MARTEAU curé constitutionnel."

 

Le 5 février 1792 MEAULLE, premier juge du Tribunal du District, paragraphe et millésime le répertoire des actes notariés détenus par Pierre ROUL, le notaire d'Erbray.

 Une nouvelle lettre du curé MARTEAU, datée du 23 avril, nous apprend qu'il se plaint du silence du District au sujet d'une infraction aux lois civiles, qu'il a dénoncée sur le champ, à propos du mariage PEAN-DUTERTRE qui n'a pas été célébré dans Son église mais dans celle du Petit-Bourg, sans les formalités civiles et canoniques requises, par le sieur BEDARD, prêtre réfractaire. Il déplore que les parties vivent ensemble alors que l'enregistrement de ce mariage n'a pas été effectué et que par conséquent il est illégitime.

 Le 3 août 1792 J-M. MARTEAU nous laisse, sur le registre d'état-civil, un écrit où il associe l'arrivée d'une nouvelle cloche dans son église et le désir qui le hante de son départ, en voici les termes :

"Ce jour il a été monté dans le clocher de cette église, une cloche du poids de cinq cent dix-huit livres, que la municipalité de cette paroisse, sur la demande que j'en ai faite, a obtenue du département de Loire-Inférieure.

Elle a été changée avec une qui était cassée, à laquelle a été jointe une autre petite et au surplus la Municipalité a fourni le poids de la matière qui excédait.

Ceci s'est fait sans aucune formalité, ni cérémonie, la cloche qu'on a eue étant venue de Chateaugontier et destinée comme les autres, suivant le décret de l'Assemblée Nationale à être fondue pour faire de la monnaie de cuivre. Ce qu'il y a de singulier, c'est que cette cloche que j'ai demandée et qui a été accordée à ma sollicitation ne paraisse montée que pour annoncer mon départ qui doit être prochain, que je sollicite et que j'attends avec la plus grande impatience. Jamais je ne me suis plus ennuyé qu'icy aucun agrément pour un homme qui pense et qui cherche des semblables. En quittant je peux dire, sans présomption et avec vérité, que j'ai rempli mon devoir en pasteur instruit et zélé. Quoique la calomnie la plus atroce, les inculpations les plus odieuses se soient réunies pour me perdre, la pureté de mes mœurs, la régularité de ma conduite, le témoignage d'une conscience qui n'a rien à se reprocher me mettent au dessus de tout, et vous chers fidèles confrères qui me succéderez, Dieu puisse vous préserver des peines et des chagrins que j'ai essuyés icy.

Orému provindicem J-M. MARTEAU".

 Ce deuxième texte du curé constitutionnel montre bien à quel point il aspire à quitter Erbray. Nous verrons par la suite qu'il n'est pas au terme de son calvaire.

 

Le 17 août 1792 ['Assemblée Législative proclame comme biens nationaux toutes les propriétés des émigrés. Suite à cette proclamation furent dépouillés de leurs biens :

1 ° - Louis Joseph CAPET ci-devant prince de sang.

2° - Le Sieur DUFRESNE de Renac Nicolas et ses enfants.

3° - Le Sieur LE MARCEREL Joseph Hyacinthe dit Chatelager.

4° - Les enfants du Sieur COLLIN de la BIOCHAIS.

5° - Janne PARIS épouse DE LA PORTE

6° - Le Sieur PERRIEN, son fils étant émigré. Voici à ce sujet le détail des biens possédés sur Erbray par ces émigrés ainsi que la liste des acquéreurs

 

PROPRIETE CAPET

- Dans la forêt de Juigné la partie Rousset            280 journeaux

- Taillis du Druillais                                             150 journeaux

- La forêt Pavée sur Erbray, Moisdon et Issé        1.500 journeaux

- L'étang de la Touche affermé pour la pêche à Pierre BOUCHET         40 livres

 

PROPRIETE DUFRESNE de Renac et Enfants

- Métairie de St-James affermée à Michel GUERRIER

Vendue le 1er Thermidor an IV (20 juillet 1796) aux citoyens Chenellière et Masseron de Chateaubriant pour la somme de 9.636,13 Frs

- Métairie de St-James affermée à Jacques POUSSIN vendue aux mêmes 8.856 Frs

- Métairie de la Boulaye affermée à moitié à Louis BARBIER     vendue aux mêmes prix non portés

- Métairie du Hadet affermée à moitié à René BARBELIVIEN vendue aux mêmes prix non porté.

- La métairie du Breil affermé à moitié à Florent LANGLAIS vendue le 15 Thermidor an IV (5 août 1796) au citoyen CAMBRELIN fils de Chateaubriant. Ledit acquéreur a été déchu et remboursé, suivant arrêté du département en date du 17 vendémiaire an V (9 octobre 1797) revendue le 11 floréal an VI (30 avril 1798 au cens de Villneuve      191.000 Frs

- L'afféagement du moulin neuf, moulin à vent loué à Guillaume GRANGLOT

- Le moulin du Châtelier arrenté à Julien BOURDEL

- Le bois janvier contenant environ 10 journaux

- Le taillis du Breil"          60 cordes

- La pièce de l'Ecotay

 

PROPRIETE LE MARCEREL

- Métairie de la Roullière affermée à Jacques GAZILLE - La ferme de la Passardière donnée à Renée BOURDEL

  

PROPRIETE Enfants COLLIN DE LA BIOCHAIS et de leur tuteur Mr FORGET

- Métairie de la Sauvagère affermée à illisible

- Métairie de la Garenne affermée au citoyen GASNIER

- Le Moulin de la Touche

 

PROPRIETE Janne PARIS épouse POTIN DE LA PORTE-Métairie de la Roussière affermée à POPIN.

Il faut cependant noter que Christian Louis COLLIN DE LA BIOCHAIS demeurant à Rennes ayant fourni des certificats attestant qu'il avait toujours résidé à Rennes, et qu'il n'avait à aucun moment émigré, rentre en possession de ses biens. De même mais beaucoup plus tard, fin février 1799, Bonne De KERBOUDEL fut rétablie dans ses biens propres ci-dessous qui avaient été saisis; mais son fils héritier de son père décédé se vit confisquer ses biens estimés à 195.642,58 Frs vendus au profit de la République. (Extrait des registres de l'Administration centrale du département du Morbihan: séance du 8 ventôse an VII (2 février 1799)

 

BIENS PROPRE de Bonne DE KERBOUDEL

- Métairie de la Morivière affermée à BICHE             100 l.

- Métairie de la Morivière affermée à LAMBALLAIS 300 l.

- Métairie de la Morivière ou demeure ALLOT            300 l.

- Métairie de l'Ecotay ou demeure Pierre LA HAYE     300 l.

- Métairie de la Touche ou demeure NARBONNE        200 l.

- Métairie de la Touche ou demeure AUGEARD           200 l.

- Métairie de la Franchetière RABOUESNEL             400 l.

- Métairie de la Franchetière GAUTRON                  120 l.

- Métairie de la Franchetière BELLANGER                 40 l.

- Métairie de ta Courpéan POUPARD                        300 l.

- Métairie du Bois-Collin GAUTRON                        300 l.

- Le moulin du Pont-Mahéas arrenté à la Vve LA HAYE et son fils

- Le moulin à vent du Perray arrenté aux mêmes

- Environ 38 journaux de taillis prisé                        200 l.

- Un taillis près de la chaussée du Chêne au Borgne      20 l.

- Le taillis des Bigaudières                                           6 l.

 

Le 20 août 1792 (An IV de la Liberté)

Le Conseil du District, dont Martin FERRON d'Erbray faisait partie, se réunit pour communiquer une information du Département selon laquelle tous les membres des corps administratifs, civils, judiciaires et militaires étaient astreints dans un délai de huit jours à prêter serment de maintenir la Liberté et l'Egalité et de mourir en les défendant. Il était enjoint de dresser procès- verbal de cette prestation et ensuite de renvoyer ce procès verbal au District. Le texte de cette communication fut diffusé le 25 courant sous les signatures de FREULET, FERRON, R-F. DAUFFY, Michel GOBBE, V. CORDEAU, BONGERARD.

 Le 20 septembre 1792, l'Assemblée Législative juste avant de céder la place à la Convention, laïcisa l'Etat-civil, institua le mariage civil et le divorce par consentement mutuel.    .

 Le 21 septembre, la Convention abolit la Royauté et décida que tous les documents publics devaient être datés à partir du 22 avènement du premier jour de l'an 1 de la République qui fut dans la foulée, le 25, proclamée Une et Indivisible.

 Suite à tous ces évènements le premier officier d'Etat-civil nommé à Erbray fut Christophe Rolland GUIBOURD, avocat, Sieur de la Boulaye.

 Le 12 janvier 1793, J-M. MARTEAU le curé constitutionnel adressa au Procureur près la Municipalité d'Erbray une lettre dans laquelle il le félicitait d'avoir été élu à cette fonction et de l'avoir acceptée bien que conscient des difficultés qu'elle pouvait présenter. Il se disait convaincu qu'il ne faillirait pas à sa tâche et lui énumérait toutes les obligations inhérentes à la fonction.

 Le 15 janvier LOUIS XVI fut condamné à mort et exécuté le 21.

 En ce début 1793, l'application de la Constitution Civile du Clergé, provoqua dans l'ouest et spécialement en Vendée la révolte des populations très attachées à leur foi, révolte qui s'amplifia encore l'annonce de l'exécution du Roi.

 D'autre part, la Convention ayant déclaré la guerre à l'Angleterre et à la Hollande respectivement les 10 et 24 février décréta la levée de 300 000 hommes dont la répartition par département amena la Loire-Inférieure à devoir fournir 3.693 soldats.

 Dans cette ambiance tourmentée, le Directoire exécutif du département pressé par les directives de la Convention et soucieux d'animer l'esprit révolutionnaire dépêcha auprès du District de Chateaubriant deux de ses membres les sieurs LE PELLETIER et HEUREUX.

 Dès le 8 mars, LE PELLETIER et HEUREUX adressèrent aux populations des 27 communes du district un vibrant appel aux armes. Le volontariat étant très faible alors que le Département avait fixé en fonction du nombre d'habitants, un effectif de 29 hommes pour Erbray, on se vit dans l'obligation d'un tirage au sort concernant les célibataires et veufs âgés de 18 à 40 ans.

 Dans toutes les communes du District à l'exception de Jans, Soulvache et Sion-Les-Mines, cette conscription déclencha l'hostilité envers les pouvoirs publics. Un peu partout eurent lieu des scènes de pillages.

A Erbray le jour du tirage au sort, deux cent habitants de Soudan saccagèrent les maisons des patriotes républicains. Durant le mois de mars de nombreuses exactions furent commises à l'endroit de ces mêmes patriotes tant par les gens d'Erbray eux-mêmes que par des personnes venues des communes voisines. Le 13 mars, le presbytère lui-même fut saccagé (Voir annexe VI).

 Suite à ce saccage, le curé adressa le 20 mars une lettre au Commissaire LE PELLETIER, dans laquelle, il l'informait de ce qui s'était passé. Il en dénonçait les principaux auteurs nommant expressément :

- THEBAULT La Moussais

- POULAIN La Roussière

- PEIGNE   La Mézie

Il demandait une peine sévère contre ces fauteurs ajoutant qu'ils pouvaient bien payer.

Le 26 mars, la Municipalité envoya sur place J.FREULET et M. GAUTIER afin d'établir en présence du curé le procès-verbal établissant l'importance des dégâts.

Le 28, suite à ce procès-verbal, le curé écrit aux autorités municipales qu'il a oublié de signaler la disparition de certains objets:

- Un étui mathématique

- Plusieurs machines de physique

- Une chambre obscure d'un optique très bon, pourvu de deux cents gravures.

- Tous les outils de jardinage.

Il estime en conscience que tous ces objets lui ont bien coûté deux cents livres. Il termine sa missive en ces termes "par caractère et par état, jamais je n'ai cherché à faire ni même à vouloir du mal à personne".

 Les deux émissaires du Directoire du Département près du district de Chateaubriant étaient très actifs. Dès le 2 avril, ils adressaient au Département un long rapport duquel il est extrait ces pages :

 Page 3 - "Nous nous transportâmes dans la réserve du bois du Drouillet paroisse d'Erbray, où le citoyen BURON nous fit remarquer 192 pieds d'arbres récemment coupés, une autre saisie infinitivement plus avantageuse faite chez un meunier a été le résultat de nos soins. Le délinquant conduit de suite chez la juge de paix."

page 9 - "L'esprit à Chateaubriant est assez bon, mais dans les campagnes il est affligeant et il n'y a pas plus de cinq à six paroisses qui soient à la hauteur de la révolution, qui soient disposées à faire les sacrifices nécessaires".

 Page 12 - Dans le fait, suivant l'opinion publique que nous avons pu nous former de l'état des richesses et des ressources du district de Chateaubriant, nous avons cru entrevoir qu'il ne présente pas un tableau aussy satisfaisant, à une quantité immense de terrains en landes ou couverts de bois s'y joint un défaut de débouchés, de transports, de relations commerciales, nulle rivière navigable n'offre à l'activité de quoi alimenter de grands établissements ni seconder la venue de l'industrie. Le génie des artisans et des cultivateurs est encore moins développé que dans d'autres districts, l'indolence, l'inertie, la défiance forment les bases de son caractère.

La population n'offre pas un résultat plus heureux.

Cette assertion paraît acquérir tous les degrés d'une probabilité évidente si l'on considère que dans l'étendue des 27 paroisses, il ne se trouve qu'un total de 32 738 âmes or, s'il est vrai comme l'attestent de fameux publicistes que la population soit un gage certain de l'abondance, de la fertilité du sol et de la prospérité d'un endroit, il faut en conclure que celuy de Chateaubriant est un des plus pauvres et des moins favorisés par la nature".

Suivent les signatures de LE PELLETIER et HEUREUX Commissaires du Département. .

 

Début avril, la maison d'arrêt de Chateaubriant étant encombrée, un transfert de 21 prisonniers eut lieu vers la prison du Bouffay à Nantes. Parmi eux, se trouvait Jacques BODINIER un tisserand du bourg d'Erbray âgé de 38 ans. Il sera acquitté le 22 juillet suivant par le tribunal criminel.

 La guerre épuisait les finances de la Convention qui émettait assignats sur assignats. Le 3 février, elle avait émis 150 millions d'assignats de 50 livres, qu'elle remplaça le 11 avril par des assignats de 400 livres et le 20 mai suivant, les riches durent s’inscrire à un emprunt forcé toujours dans le but de pourvoir aux dépenses militaires.

 Le 12 avril, nouvelle lettre du curé MARTEAU au commissaire LE PELLETIER, signalant qu'il était démuni de tout et sans moyens pour vivre. Il lui rappelait les promesses d'indemnisation qu'il lui avait faites suite à la dévastation de son presbytère par les brigands.

 Le 5 juin 1793, Nicolas LEJEUNE, Commissaire près du directoire du canton de St-Julien de Vouvantes, fait parvenir au notaire d'Erbray, Pierre ROUL, une délibération du syndic du district le nommant rapporteur de la vente des meubles et effets de l'ex-curé GRIGNE.

Cette décision fut prise à la suite du décret de la convention ordonnant la vente des biens des émigrés.

La vente eut lieu dès le 6 juin et rapporta, selon le notaire 224,75 livres. Quant à la vente des effets de l'ex-vicaire DURONSSEUR, elle n'aura lieu que le 30 ventôse et effectuée par le citoyen LE FOUX elle donnera 26,50 livres.

 Le 2 juillet 1793, un arrêté du Directoire du district est adressé au capitaine de la garde nationale d'Erbray, François GUIBOURD des Rigaudières en ces termes :

"Citoyen collègue, je vous envoie, ci-joint, une expédition de l'arrêté du Directoire en date de ce jour qui vous nomme Commissaire pour rapporter inventaire LE TORT de la Forge en Moisdon, conformément à l'arrêté du département du 20 avril, votre zèle bien connu pour la République me persuade que vous ne refuserez pas de partager en cette circonstance les travaux multipliés de J'administration, d'autant plus que la loi vous met en permanence.

Je suis vôtre signature illisible".

 François GUIBOURD était le frère de Christophe Ro11and GUIBOURD, tous les deux fils de François GUIBOURD, sieur de l'Oûtre.

 

Le 29 jui11et, la Convention par son décret n° 826 émet à nouveau 1 200 millions d'assignats (cent assignats ne valent que quarante huit livres en argent métallique).

 Le 1eraoût la Convention déclare à la Vendée, la guerre totale et y envoie l'armée de Mayence, commandée par KLEBER. Alors à Erbray, plusieurs jeunes gens prennent le maquis et par le fait sont déclarés émigrés et en conséquence leurs fami11es se voient confisquer leurs biens au profit de la nation.

Voici la liste des personnes pénalisées :

- Jan RABOUESNEL de la Franchetière, père d'émigré. Une maison, trois pièces de terre, deux jardinets situés à la Moussaye. Prisés 20 l.

- Jacque HOUDEMONT de la Bréjaudaye, père d'émigré. Une ferme au village de la Touche prisée 24 l.

- Joseph RESTIF de la Gélinaye en Béré, père d'émigré. Une ferme au village de la Mézie affermée à Vve BADOUIN, deux petites fermes l'une située à la Goueslardière l'autre au Hadet en indivision BARBIER

- Ambroise LACROIX, émigré. Une ferme à la Moussaye indivise avec ses deux frères.

Plus un constitut au principal de 300 livres sur Etienne LETORT des Garelières.

 - Pierre MERCIER, émigré. Un constitut au principal de 150 l. en date du 10 mai 1793 sur Ollivier DAUFFY, tailleur, demeurant au bourg d'Erbray.

- Pierre COUE de la Tousche en Moisdon, père de Pierre COUE abbé à Moisdon, émigré, une ferme à la Joussaye en Erbray.

- Martin HAROUlN, père d'émigré, une ferme au village de la Noë-Poirier prisée 160 l.

- Jean HENRY, père d'émigré, une ferme à la Boullaye vendue par lesdit HENRY père il y a plusieurs années dont il s'est réservé la jouissance, une ferme en indivision au Pont-Mahéas. Prisée 100 l.

 

Le 1er août 1793, le citoyen DEBRUIRE de la Moussaye, adresse au citoyen Pierre BOUCHET, procureur de la commune d'Erbray une lettre ainsi rédigée :

 "Citoyens et Officiers municipaux

 En vertu du pouvoir qui vous est accordé par Elections, il vous plaise faire droit à la présente réquisition à la première Assemblée que vous tiendrez dans le lieu ordinaire de vos délibérations.

Il existait, il y a très longtemps à votre connoissance à tous, une chape de velours violet, couleur éteinte par son ancienneté et ayant pour différence des autres un criste derrière le dot. Son domicille, et pour le respect de son service, étoit d'estre pliée dans une des armoires de la sacristie ou au revestuaire. Elle eut le bonheur de plaire au citoyen J-M. MARTEAU, curé de cette paroisse, donc il l'en a extraitte en la portant chez lui dessous son aube pour la cacher aux yeux du monde, après l'avoir démembré par pièces, il la jugea propre à se faire faire une culotte et une veste, ne la trouvant pas propre d'en tirer un habit. La doublure a tout de suite trouvé sa place pour faire un tablier à poche à sa soit disant niesse, pour en frauder davantage la connoissance au public, il l'envoyée à Rennes pour la faire teindre en noir dans le mois de février dernier avec un paquet de livres en brochures le tout à l'adresse de la visitation.

Qu'il vous plaise citoyens vérifier les ornements appartenant à l'église Saint­Martin d'Erbray, pièces par pièces pour vous assurer de mon exposition et je demande la plus sévère punition, si vous trouvez laditte chape et autre effets manquant, j'ai un bonnet qui a été fait pour la petite fille du temps qu'elle étoit ché ma bourgeoise, vous en désigneré l'étoffe, le Criste rouloit par terre dans la cure je l'ai ramassé et rendu avec le bonnet au citoyen procureur de la commune.

 Vous obligeré cher concitoyen. Signé Antoine DEBUIRE.

 

A la suite de cette lettre, la municipalité dépêcha sur place les citoyens Jean GAUTIER et Etienne AUGEARD pour procéder à l'inventaire des ornements, linges et vases sacrés servant au culte. (Voir annexe VII)

 Le curé J-M. MARTEAU, ainsi visé, on le voit était loin d'avoir une vie paisible à Erbray. Il poùvait regretter d'y être venu.

Il finira par y laisser la vie.

 Entre-temps, un long rapport sur la réforme des fermages et des impôts dans le District, a été rédigé par les deux Commissaires du Directoire du Département près le district de Chateaubriant. (Voir annexe VIII)

 Le 23 août, la Convention décrète la levée en masse, appelant deux millions de Français sous les drapeaux.

 Le 26 septembre, le syndic du District adresse une lettre au citoyen Pierre ROUL notaire à Erbray, lettre à laquelle était jointe une délibération du Directoire du District du 23 courant le nommant rapporteur de tous les actes nécessaires à la levée des scellés mis sur les grains de la veuve PRAUD à St-Julien.

 Le 30 septembre le même syndic, adressait à la Municipalité d'Erbray le texte de deux décrets dont l'un d'eux indiquait qu'il était ordonné aux représentants du peuple: MEAULLE, FOUCHE, PHILLIPPEAUX et LA V ALLIER, de se transporter dans les départements du centre et de l'ouest pour inviter les citoyens à prendre les armes contre les rebelles de Vendée.

 Le même jour le Receveur faisait parvenir le montant de l'impôt foncier dont la commune était redevable. A cette date c'était Marie-Joseph GUIBOURD frère de François et de Christophe-Rolland qui était directeur des Postes à Chateaubriant. .

 Le 24 octobre 1793 le calendrier républicain est institué, son premier jour étant le 22 septembre 1792.

 Le 6 novembre (16 brumaire) la Convention déclare que les municipalités sont libres de renoncer au culte catholique et autorise la fermeture des églises.

 Il est enjoint aux municipalités de créer des comités de surveillance, Erbray aura le sien à compter d'octobre.

 Le 20 novembre (30 brumaire) une circulaire est adressée aux acquéreurs de biens nationaux qui n'ont pas soldé leurs achats à savoir:

 - Pierre PINON, Pierre JOUNEAUX de St-Julien de Vouvantes

 - Veuve GESLIN, François GUIBOURD, François PITRAULT, François LOUARD, Julien JAMBU, Jean COCAULT, Pierre DUVAL, Françoise PERIEN, de Chateaubriant

 - Victor TAILLANDIER, Pierre AUBIN, Pierre BICHE,  Bertrant ERNOUL, de Moisdon la Rivière

 - Jean-Baptiste PORTIER de Jans

- Jean BROCHARD de Lusanger

- Pierre MASSICOT de Saint Vincent des Landes

- Claude HEUREUX de Nozay

- Louis PATY d’Issé

- Jean DUCLOS de Villepôt

- Joseph BARON de Soudan

- Claude LORY de Nantes

- Louis RABINE de Chanveaux

- Jean LISE de Louisfert

- Daniel LUCAS de Sion les Mines

 

Voici les termes de cette circulaire :

"Vous êtes en retard depuis le … de payer le terme de votre acquisition des …         Les besoins de la République ne permettent pas un instant de suspendre la rentrée des fonds qui lùi appartiennent et vous savez que faute de payement il m'est présent par la loi de faire revendre les biens à la folle enchère des acquéreurs.

Vous voudrez bien citoyen au reçu de la présente effectuer la payement du terme dont vous êtes redevable.

 En cette fin 1793, la délation a libre cours à Erbray. C'est ainsi qu'une dénonciation anonyme, adressée le 11 novembre au district, mentionne que Jean HENRY et Jean RABOUESNEL sont absents de chez eux depuis un certain temps sans que l'on sache où ils se trouvent.

A la suite de cette information, le district mit les officiers municipaux d'Erbray en demeure de lui transmettre: les motifs de leur absence, le lieu de leur retraite et dans le cas où l'on devrait les déclarer émigrés : l'inventaire de leurs biens.

Ces faits montrent en plus de ceux précédemment relevés que bien que la majorité des habitants ait été en 1789, favorable aux idées nouvelles, le déroulement imprévu des évènements avait profondément divisé la population d'Erbray, mais jusqu'alors la tension existante, n'avait entraîné aucun homicide sur le sol paroissial. On verra qu'il n'en sera pas de même en 1794.

 Cette année 1794 sera pour Erbray et sa région une période troublée par toutes sortes d'événements plus ou moins tragiques que nous mentionnons dans l'ordre chronologique et dont la relation donne sur cette funeste année un éclairage tout particulier.

 Dès les premiers jours de janvier (3-4 janvier) 12-13 nivôse, Martine HAROUIN d'Erbray est surprise avec un groupe de rebelles de Soudan, suspectée d'être brigante et fusillée sur le champ par ordre du général MARCEAU, devant le Château de Chateaubriant.

 Pour faire face aux besoins de l'armée en guerre, des réquisitions en tous genres et de plus en plus rapprochées ont lieu. C'est ainsi que le 17 nivôse (8 janvier) l'adjudant-général SAVARY ordonne près des officiers municipaux, la fourniture immédiate de 30 paillasses, de 30 couvertures et de 30 paires de draps.

 Le 19 nivôse ( 10 janvier) le syndic du district adresse aux 27 municipalités de son ressort une circulaire leur enjoignant de recueillir les habits et chevaux des militaires déserteurs.

 Le 25 nivôse (17 janvier) le comité de surveillance du district se renseigne auprès du comité de surveillance d'Erbray sur le dénommé Louis ROUL qui a été arrêté.

 Le 27 nivôse (18 janvier) on réquisitionne des charretiers pour se rendre à la Forge.

 Le 7 pluviôse (29 janvier) le district de Chateaubriant demande des éclaircissements aux responsables municipaux d'Erbray sur deux hommes qui ont été réquisitionnés avec leurs chevaux bridés et sellés. Il s'enquiert s'ils ont bien amené ces chevaux à Chateaubriant et à qui ils ont été remis. Une prompte réponse est exigée.

Le 13 pluviôse (4 février), le syndic du District fait parvenir au citoyen GUlBOURD - Rigaudières le libellé suivant :

"Je t'adresse ci-joint délibération du Directoire du 12 de ce mois (3 février) qui te nomme Commissaire pour faire la vente du mobilier de la communauté de la Meilleraye". .

 Le 17 pluviôse (8 février) le même syndic intime aux officiers municipaux l'ordre de réquisitionner, de suite, six métayers pour amener de la chaux à Chateaubriant. Il est souligné que l'intérêt de la République exige la plus grande célérité.

 Le 28 pluviôse est redigé le compte-rendu de l'exécution de FRESNAIE DE BEAUMONT de St-Julien. En voici les termes :

"Arrivé à 10 heures, ce jour à midy et demy exécuter, à la satisfaction de tous aux cris de vive la République, en châtiment à ses forfaits, il y a longtemps qu'un tel monstre aurait dû avoir passé au rasoir national".

Le même jour 28 pluviôse le citoyen GUlBOURD Rigaudière reçoit du district la missive suivante:

"Citoyen je t'annonce que la vente du mobilier de la cy-devant abbaye de la Meilleraye est fixé au sextidi ventôse (27 février) qu'ayant été nommé Commissaire par l'administration pour y faire procéder, tu aies à t'y trouver à cette époque.

Salut et fraternité".

 Le 4 ventôse (25 février) la requête formulée par le citoyen Martin FERRON d'Erbray réclamant 280 livres pour son cheval et 5 livres pour la selle, suivant certificat de la municipalité, est acceptée.

 Le 6 ventôse (27 février) le syndic demande aux officiers municipaux d'Erbray d'afficher la vente des meubles de FRESNAIE DE BEAUMONT condamné à mort.

 Ce rapide aperçu des deux premiers mois de 1794 montre qu'Erbray est pris plus ou moins directement dans la tourmente révolutionnaire et que si sa population comprend des patriotes très dévoués à la République elle comporte aussi et en proportion sensiblement égale des habitants qui y sont très hostiles.

Toutefois, les gens dans leur grande majorité demeurent prudents et attentistes se pliant la plupart du temps aux réquisitions et montrant aussi quelque inclination à soutenir ceux que l'on appelle les chouans.

En ce début de mars, après l'exécution de FRESNAIE DE BEAUMONT, organisateur dans la région d'une contre-révolution, l'on continue de se rencontrer la nuit dans les greniers et l'on cherche un nouvel entraîneur.

 

D'autre part, après le désastre de l'armée vendéenne à Savenay, en décembre 93, plusieurs rescapés ont réussi à rejoindre leurs familles.

Parmi eux se trouvent Jean PACORY d'Issé, ainsi que Jean TERRIEN, ancien séminariste revenu chez ses parents à Maumusson, lors de la fermeture des séminaires en 1790.

A l'époque les parents de Jean TERRIEN étaient métayers de la famille de FERMON aux Chapelières en Maumusson et un de ses oncles était également métayer des de FERMON à Gastines en Issé.

 Ces deux garçons vont continuer la lutte et pour cela font des plans, contactent des amis sur Issé, Louisfert, Moisdon, La Meilleraye, Petit et Grand Auverné, St-Julien, Soudan, La Chapelle-Glain, Erbray, St-Sulpice. Ils arrivent ainsi à constituer un groupe assez important qui mènera une guérilla efficace pendant plusieurs années dans la région entre Ancenis et Chateaubriant et cela à partir des bois et forêts où ils se cachaient pour organiser leurs coups de mains.

 De bon matin, le dimanche 2 mars, Victorine HUET accompagnée d'Anne TERRIEN, sœur de Jean et d'un meunier chargé de conduire l'attelage étaient en route vers Gastines où il devaient acheminer les redevances de fermage dues aux FERMON.

 Bien que munis de sauf-conduits, ils furent arrêtés et fouillés à Moisdon et c'est alors que fut trouvée dans la coiffe d'Anne TERRIEN une lettre compromettante qui entraîna l'arrestation des demoiselles DE FERMON et de certains membres de la famille TERRIEN. Cela déclencha aussi de nombreuses perquisitions dans la région.

 Craignant par suite de ces évènements d'être appréhendée à cause de son fils que l'on disait caché dans les bois de la Morivière, Bonne De KERBOUDEL veuve du marquis DE PERRIEN, qui se trouvait au château, se fit enfermer, dans un tonneau dissimulé au milieu d'une charretée de fagots. C'est de cette façon que par l'Epine-Blanche, la Ville Marie, Béré, elle gagna Rennes.

 Le 8 ventôse (1 cr mars) les administrateurs du District avaient envoyé leurs instructions à GUIBOURD des Rigaudières au sujet de la vente de la Meilleraye. Voici en quels termes :

"Nous avons reçu tes deux lettres des 6 et 7 ventôse (27-28 février). Nous nous empressons d'y répondre.

Le premier et le deuxième bail dont CARON et GUICHARD ont été adjudicataires ne parlant point de pressoir, les fermiers n'en étant point chargés de l'entretien, par le procès-verbal du 18 décembre (vieux style).

Il en résulte que ledit pressoir ne fait point partie de la ferme, que GUICHARD ne peut en prendre jouissance et que ce pressoir pourrait être vendu, mais considérant que cela ferait un tort notable à la métairie pour la vente, que le pressoir y est attaché, que devant faciliter la vente des domaines nationaux, nous ne sommes pas d'avis qu'il soit vendu, en conséquence vous le réserverez.

Si la marmitte n'est pas utile à l'armée, elle peut l'être pour l'hôpital militaire, elle doit être également réservée, car il n'y aurait aucun avantage à la mettre en vente, si le prix de la vente ne seroit pas équivalent à l'article où elle ferait à un hopital, qui en général a besoin de tout.

A l'égard des livres, on ne peut les faire enlever qu'il ne soit préalablement établi un local pour les recevoir, jusque là les livres resteront à Meilleraie dans les endroits où ils sont.

Reste l'objet des effets, paillasses, bois de lits, couettes, mis en réquisition par le citoyen LUCAS. Nous ne pouvons ni ne devons les vendre, nous t'en avions prévenu d'avance de les réserver et nous te le répétons; mais tu ne les enverras pas à Ancenis jusqu'à ce que nous ayons une réponse formelle du département à qui nous avons dépeind l'état de nôtre hôpital de Chateaubriand, qui est un hôpital militaire.

On ne peut vendre la forge et le souflet qui peuvent être utiles à l'armée, il faut les réserver.

Dudit 8 ventôse. Les administrateurs."

 

Le 10 ventôse (3 mars) les mêmes administrateurs précisent à GUIBOURD "Tout doit-être conduit au magasin militaire de Chateaubriant pour éviter

toute dilapidation.                                .

 Le 11 ventôse (4 mars) les administrateurs toujours aussi actifs signalent aux officiers municipaux de la commune d'Erbray de nombreuses désertions.

 "Républicains,

Nous sommes informés que beaucoup de jeunes gens de la 1° réquisition de votre commune ont abandonné leur compagnie sans permission et se sont retirés chez eux, nous vous en faisons passer la liste ci-joint, pour que vous les fassiez rejoindre de suite.

La loi vous en fait un devoir sacré, et votre patriotisme nous garantit que vous ne négligerez rien pour cet effet, nous vous déclarons néanmoins que s'ils ne rejoignent pas de suite nous serions obligés de faire usage des voies rigoureuses de la Loi en pareil cas.

Liste :

 PAGEOT Julien, JOLIVEAU Julien, DERVAL François, DUPRE Nicolas, POTIN Jean, LAURENT François, TESSIER Julien, GAUTRON Joseph, AUGEARD  Nicolas, LAMBALLAIS Pierre, MONDOUET Louis, HAMON Etienne, POUSSIN Pierre, CHENUET Martin, DURAND Mathurin, DELAUNAI Ollivier, LE NEIL Jan, MARCHAND Julien, MARION Pierre,  BARBIER Pierre,   DERVAL Jean,  DUTERTRE Jean,  GRANDIERE Joseph,  GEORGET Louis, BORDIER Julien,  MESANGE François, COLIN Ambroise, VALOTAIRE Jean, VOUSAIN René, CADOREL André, TESSIER René, BAUDRIER Jean, BOURDEL Pierre, BARBOTIN Julien, GRIMAUD Jean, FERRON Julien, TESSIER François

 Salut et Fraternité.

Le 15 ventôse (8 mars) une lettre du ministre de la guerre est envoyée aux communes. Elle fait obligation à tous les possesseurs d'armes de calibre de guerre de les déclarer sous peine de confiscation et d'une amende de 300 Livres.

 Le 18 ventôse (II mars) une circulaire du même ministre, enjoint aux 27 municipalités du district de rassembler de suite les jeunes gens de la 10 réquisition et de les faire conduire à Chateaubriant.

 Le 20 ventôse (13 mars) eut lieu l'arrestation de Jean LAMBERT de la Roullière.

Celui-ci le 20 nivôse et le 12 ventôse avait été requis pour les besoins de l'armée de livrer la première fois du foin à Chateaubriant et la deuxième fois de la paille au citoyen DUCLAND.

Pas plus une fois qu'à l'autre LAMBERT n'avait obtempéré.

Dès le 23 nivôse, après son premier refus, deux officiers municipaux Jacques FERRON et Pierre HENRY se rendirent chez lui pour lui demander les raisons qui l'avaient conduit à ne pas obéir. Il répondit :

"Qu'ils prennent tout ce que bon leur semble; mais je ne veux ny estre présent, ny aider à peser, ny le faire conduire par mon harnois."

Devant son second refus, les autorités (les officiers municipaux, l'Assemblée l'agent national d'Erbray) estimèrent que LAMBERT avait une conduite suspecte et décidèrent de son arrestation. Ordre fut donné à François GUIBOURD un des capitaines de la garde nationale de le conduire à Chateaubriant devant les administrateurs du District sous escorte d'un caporal et de quatre fusiliers.

L'ordre fut signé par : J. GAZILLE (voisin), RETIF, N., ROUL, P. MARCHAND, J-H. MITAILLE, P. BARBIER, René-François DAUFFY, A. HOGUEREL, J. BOURDEL, POUPLIN et présents Pierre DAULE et Etienne AUGEARD qui déclarent ne savoir signer.

 LAMBERT fut interrogé à Chateaubriant et au vu de ses réponses les membres du Directoire le prirent pour un fanatique. (Voir annexe IX) LAMBERT fut alors définitivement arrêté et selon un communiqué du district à la municipalité d'Erbray l'enregistrement de son interrogatoire fut envoyé au Tribunal révolutionnaire de Nantes où LAMBERT sera transféré.

 Le 2 genninal (22 mars) à la suite d'un interrogatoire, René BODIER natif de Soudan âgé de 28 ans, aubergiste à Erbray marié père de deux enfants est condamné à mort.

Durant cet interrogatoire, Christophe Rolland GUIBOURD, 41 ans, maire d'Erbray a signalé que le 16 mars, BODIER est arrivé chez lui, armé d'un fusil, lui demandant de faire sonner le tocsin. Lui ayant demandé la raison de cette démarche, BODIER répondit qu'il voulait appeler à venger la mort de cinq de ses partisans de Soudan tués par les patriotes.

Le gendarme CA THELINAI de la brigade de Nozay et Louis PÉLICOT officier municipal d'Erbray ont indiqué que lors de son interrogatoire, BODIER a été amené à dénoncer plusieurs personnes de Soudan, Jacques HOUDEMON de la Brégeaudais et LA CROIX habitant près du bourg d'Erbray.

 "Le 21 germinal (10 avril) les administrateurs du district communiquent à l'adjudant-général SAVARY, commandant les troupes du secteur Républicain,

Nous t'adressons copie d'une lettre que nous venons de recevoir de la municipalité d'Erbray, nous t'invitons à y envoyer de suite un détachement pour y faire les recherches les plus exactes, afin de découvrir les coupables, les saisir et les conduire ici, avec communication à la municipalité."

 Le même jour, 21 germinal, ces mêmes administrateurs avisent les juges du Tribunal révolutionnaire de Nantes, qu'ils leur font conduire par la gendarmerie, les nommés: Jean LAMBERT d'Erbray, TERRIEN de Gastines en Issé, DERMAILLE et Jacques AUVRAY de Rougé.

Le 25 germinal, et d'après un extrait du registre de la municipalité d'Erbray, Martin FERRON, commandant de la garde nationale du canton de St-Julien, indique aux membres de la municipalité et du comité de surveillance, qu'il est informé qu'une troupe de brigands réside dans la Forêt-Pavée et qu'elle va probablement se répandre dans les environs pour piller et égorger les habitants.

Il est d'avis d'intervenir par la force le plus rapidement possible. Il sollicite à cet effet près du district et de l'adjudant-général SAVARY, une intervention et pour cela demande armes et munitions permettant d'équiper deux cents patriotes du canton.

Les municipalités devraient assurer la solde de ces deux cents hommes pendant trois mois à raison de trente sous par jour. Le montant de cette solde serait prélevé sur tous les citoyens du canton.

Pour appuyer sa demande, il assure que cette petite force lui permettra de détruire ces attroupements avant qu'ils ne prennent trop d'importance. L'Assemblée s'est trouvée divisée sur cette initiative et a décidé d'en faire part aux administrateurs du District et à l'adjudant-général SAVARY.

Le 26 germinal (15 avril) les administrateurs du district, signifient aux communes suivantes:

Moisdon, Erbray, Soudan, St-Julien, La Chapelle-Glain, Rougé, Villepôt, Juigné, Ruffigné, Chateaubriant, Issé, Louisfert, St- Vincent, Lusanger, Meilleray, Fercé, NoyaI, l'ordre de dégager sous trois jours, les abords des routes et chemins les plus fréquentés sur 200 mètres de profondeur de chaque côté et cela afin de prévenir toute attaque des brigands.

Les hommes employés à ce travail seront payés avec le bois récupéré.

 Le 27 germinal (16 avril) le comité de surveillance de Chateaubriant enjoint à celui d'Erbray, de faire surveiller de près le nommé THEBAULT de la Moussaye , DUPAS et PIGREE de la Touche qui ont participé au pillage de la Cure du curé constitutionnel.

 Le 28 genninal (17 avril) la liste des membres du comité de surveillance de la commune est envoyé au département. Cette liste a dû être fournie par toutes les communes du district qui avaient constitué ces comités.

 Le 29 germinal (18 avril) SAVARY écrit à l'agent national d'Erbray, ceci: "Ton domestique a déposé trois paquets de bois de bourdaine envoyés.

Je me réjouis de ton zèle et t'engage à redoubler d'activité; mais je dois t'observer que l'arrêté de la commission des armes et poudres ordonne de réduire ces bois en charbon sur les lieux, je t'engage à t'y conformer."

Le lendemain 30 germinal le même SAVARY au comité de surveillance d'Erbray  :

" Je vous adresse ci-joint l'arrêté du Directoire du 27 germinal qui vous recommande les plus exactes surveillances sur les nommés THEBAULT et PEIGNE de votre commune, je compte sur votre zèle pour surveiller et faire arrêter tous les gens suspects, rappellez-vous que la loi vous a chargé de la police de sureté générale et que vous répondrez sur vos têtes de la moindre négligence. "

 Le 30 germinal (19 avril) René DENIAU, arrêté la veille, est fusillé par les troupes de l'adjudant-général SA VARY.

 En ce mois de germinal, les réquisitions ont plu :

12 germinal (1er avril) six harnais sont réquisitionnés pour transporter des fourrages de Chateaubriant à Nantes.

- Le 16 germinal (5 avril) FERRON en sa qualité de Commissaire est chargé des réquisitions de patates, pois, fèves, haricots, blé noir et autres produits alimentaires. Il devra quinze jours plus tard recenser les cochons.

- Le 20 germinal (8 avril) un autre Commissaire BOUCHET est chargé de recenser les foins et pailles de la commune.

 Le 1er Floréal (20 avril) l'assemblée qui avait délibéré le 25 germinal sur la demande de Martin FERRON fut saisie par René PROVOST de la Rolandière, d'une demande d'un passeport qui lui permettrait de vaquer à ses affaires. Ce qui lui fut refusé, car la dite Assemblée avait été informée par sa sœur épouse de René DENIAU fusillé le 30 germinal que ce dernier avait été arrêté parce qu'un fusil appartenant précisément à René PROVOST avait été trouvé chez lui.

Aussi l'Assemblée décida-t-elle de l'arrêter et de le faire conduire devant Martin FERRON commandant la garde nationale du canton qui prendrait une décision à son sujet. Sur l'intervention du citoyen Louis GAUTIER officier municipal, il fut relâché, vraisemblablement parce qu'inapte à assurer sa défense. .

Suivent les signatures des membres ayant délibéré: C-R. GUIBOURD, J. ROUL, L. GAUTIER, N. ROUL pour Martin HERVE, J. FERRON, F. ROUL pour Pierre DAULÉ, A. HOGUEREL, F. PESLERBE pour Pierre HENRY, Jh. MITAILLÉ, J. GAZILLE, J. MARCHAND, J. FREULET, P. BINOT, POUPLIN pour Martin BREGEAUD, CH. DAUFFY, P. BARBIER, P. ROUL pour Julien LE BRETON, P. JOUSSELIN, J. GAUTIER pour Etienne AUGEARD, N. ROUL, J. LEUSSIER, R-F. DAUFFY, L. BURON, JH. BODINIER pour Jacques HOUDMON, F. GUIBOURD pour Martin COLIN, M. PÉAN, Jan BICHE pour Ambroise RABOUESNEL et ROUL sécrétaire.

Le 2 floréal (22 avril) le curé constitutionnel J-M. MARTEAU est tué.

Le registre de décès de l'état civil de la commune le mentionne sous le numéro 13 dudit mois en ces termes :

"Aujourd'hui deux floréal, l'an second de la République Française, Une et Indivisible à sept heures du soir, à moi Christophe Rolland GUIBOURD, officier public, étant à la maison commune, un procès-verbal en date de ce jour fut remis. Raporté par le citoyen Nicolas LE JEUNE, juge de paix du canton de Saint-Julien de Vouvantes, par lequel il est constaté que le citoyen Joseph Marie MARTEAU ci-devant curé de cette commune, âgé de quarante neuf ans, originaire de la ci-devant commune de Saint-Germain de Rennes, demeurant depuis peu à Chateaubriant, fils de feu Jan MARTEAU arquebusier et de feue citoyenne Janne Françoise POTTIER, a été tué ce dit jour, sur la route de Chateaubriant audit Saint-Julien de Vouvantes à la distance de cent cinquante pas de bout de la chaussée de l'étang de la Touche, en cette commune, du coté d'ouest, de tout quoi, j'ai rapporté le présent acte de décès, sous monseing, lesdits jour et mois que ci-devant."

C-R. GUIBOURD

 

Le 7 floréal (27 avril) nouvelle réquisition.

Ordre est donné par le Directoire aux 27 municipalités du district de rassembler 30 chevaux, 20 cochons, 20 bœufs, ainsi que des mulets et des charrettes. On récupérera aussi l'étain, tous les vases sacrés, des souliers, des cordes y compris celles utilisées pour sonner les cloches. Et pas une minute à perdre est-il précisé.

 Le 13 floréal (3 mai) encore une réquisition exigeant 44 qx de foin, 62 à 96 qx de paille, 51 boisseaux d'avoine, (mesure de Paris).

 Le 19 floréal (9 mai) il est imposé à la commune d'Erbray afin d'approvisionner le marché de Chateaubriant de fournir mensuellement 10 qx de blé, froment ou blé noir.

 Le 27 floréal (17 mai) ordre est donné par l'adjudant-général SAVARY d'avoir d'urgence à faire couper les haies de chaque côté de la route de Rennes à Angers.

 Le 30 floréal (20 mai) la municipalité reçoit notification de sa contribution foncière ainsi établie :

 

PRINCIPAL FDS DES DECHARGES DEPART DISTRICT TOTAL
         

 

 2 sous par livre

 

 

 

 8836

883

793

2.084

3.760

 

 

 

 

 465

 46

88

290

425

 

Le 18 prairial (7 juin) les administrateurs du District écrivent aux responsables de la municipalité d'Erbray que les citoyens BALLAIS et CHAUVEAU approvisionneurs de l'armée ayant acheté de la chaux avec le citoyen FERRON, il conviendrait qu'on requît des métayers pour le transport de cette chaux, ajoutant que l'intérêt de la République réclamant toute leur sollicitude ils ne doutent pas un instant de leur empressement patriotique.

 Le 21 prairial (14 juin), l'Adjudant-Général SAVARY réquisitionne deux chevaux.

 Le 25 prairial (14 juin) le commissaire BOUCHET d'Erbray présente au district la note correspondant à 210 journées de travail consacrées au rasement des bois de la Latte et du Gâtinel situés le long de la Grande route de Chateaubriant à Angers et appartenant au ci-devant CAPET. Note acceptée.

 Les réquisitions répétées effectuées depuis un an, indisposent les habitants qui de plus doivent se plier à des recensements mal acceptés de sorte que les brigands profitent du mal ainsi croissant pour conduire des expéditions punitives. C'est ainsi que le 2 messidor (23 juin) ils tuent HOGUEREL de la Roullière. Le registre des décès de la commune mentionne ce décès sous le n° 25 de juin de la façon suivante:

"Aujourd'hui sept messidor (27 juin) de l'an second de la République Une et Indivisible, à sept heures du matin, il m'a été remis à moi C-R GUIBOURD, officier public, étant en la maison commune, un procès-verbal en date du trois de ce mois raporté par le citoyen LE JEUNE, juge de paix du canton de Saint-Julien de Vouvantes par lequel il est constaté que le citoyen Ambroise HOGUEREL, demeurant au village de la Roullière en cette commune fut tué ]e deux de ce mois dans la pièce de fontaine. Lequel citoyen HOGUEREL était âgé de 43 ans originaire de cette commune, fils de feu Ambroise HOGUEREL et d'Ursule DELABEE, de tout quoi, j'ai rapporté le présent acte de décès, sous mon seing lesdits jour et mois que devant."

C-R GUIBOURD

 

Début messidor parvient à Erbray ]a nouvelle du décès de Michel GUIBOURD âgé de 30 ans, fils de Michel GUIBOURD officier municipal et de Jeanne MOUTEL, habitant la Mogonnais.

Michel GUIBOURD était parti comme volontaire et avait été incorporé dans la neuvième compagnie du huitième bataillon de l'Aisne. Le document officiel mentionne son décès à l'hôpital de Bitche le 27 juin. (V. annexe 12bis)

 Début messidor également, l'administration du District a adressé aux 27 municipalités une note leur rappelant pour chacune d'elles l'obligation d'ouvrir une école primaire.

Suite à cette note, le 11 messidor (1er juillet) MESLET président de l'administration municipale du canton de St-Julien, envoie au citoyen président du département chargé de l'enseignement la lettre suivante: Citoyen président,

Il y a au chef-lieu de canton un jeune homme qui fait l'école, il n'est point établi en vertu de la loi du 3 brumaire (26 octobre 1793) il n'est pas du choix du jury, attendu qu'il est sans traitement, il y a environ 15 écoliers, il paraît avoir bonnes mœurs, s'est rendu à toutes les fêtes publiques et n'a fait paraître aucun sentiment contraire aux lois de la République et au bien en général.

Il n'est pas venu à notre connoissance que ceux qui le payent se plaignent de son exactitude.

Il n'existe pas d'autres écoles dans le canton."

Salut et fraternité MESLET

 

Le 4 thermidor (22 juillet) les brigands reprennent l'offensive à Erbray et tuent trois patriotes:

Martin FERRON 51 ans commandant la garde nationale du canton, de la Rousselière. .

Etienne LETORT 30 ans maréchal taillandier des Garrelières.

Jean BONAMI 30 ans journalier demeurant à la Rabousnelière.

Leurs décès figurent au registre de la commune d'Erbray sous les numéros 27 - 28 - 29 - de juillet 1794 avec les procès-verbaux de MAIENCE, officier de santé.

D'autre part les circonstances de leur mort ont fait l'objet d'un compte-rendu redigé par le juge de paix et dont voici l'extrait de la minute :

"Nous Nicollas LE JEUNE, juge de paix du canton de Saint-Julien de Vouvantes, sur l'avis qu'il nous a été donné qu'il s'était commis un assassinat le quatre courant au village de la Rouxelière en la commune d'Erbray, en la personne de Martin FERRON, Jan BONAMI, Etienne LETORT, suivant le raport et le procès-verbal de l'officier de santé qui en a fait la visite en présence. .

Nous nous sommes transportés accompagné du citoyen MACAULT notre greffier audit village de la Rouxellière pour faire des informations sur cette assassinat, y étant arrivé, nous avons été chez les habitants dudit village qui nous ont déclaré scavoir :

Jan CHAUVIN a déclaré avoir vu quatre hommes à lui inconnus armés de fusils dont deux conduisaient Jeanne FERRON et les deux autres lui demandèrent son nom et où il voulait aller, il répondit charoyer du foin.

Va-t-en vite lui répondirent-ils.

Il y en avait un en gilet rouge et les autres en bleu. La femme Ambroise PEIGNE a déclaré qu'en s'en revenant de couper de l'avoine, elle avait entendu les premiers coups de fusils, elle s'était retirée chez elle et n'avait pas vu ceux qui avaient tiré.

Pierre RETIF a déclaré avoir vû un homme en gilet bleu et ne l'avoir pas connu.

La veuve ROUGE a déclaré avoir vu quatre hommes, à elle inconnus, le bas du menton enveloppé dans un mouchoir, ils firent rendre les armes à Martin FERRON, lui disant que s'il ne les donnait pas ils allaient tuer sa fille Jeannette qui était en leur pouvoir, ce père aima mieux se sacrifier pour sauver la vie de sa fille, ils le prirent et le menèrent dans un chemin à côté et le tuèrent.

Pierre NALIN du village de la Bucquetière a déclaré avoir vû quatre hommes à lui inconnus, un avait une culotte noire, un autre en avait une de peaux, un autre avait un gilet sans manche.

Jeanne FERRON a déclaré que quatre brigands l'avaient prise dans une pièce de grain, qu'ils l'avaient conduite à la demeure de son père et qu'il s'était livré à eux pour sauver sa fille.

 A la suite de ces assassinats, les patriotes s'émurent et le 6 thermidor (24 juillet) la Société populaire d'Erbray délibéra sur les honneurs à rendre au citoyen Martin FERRON, voici le texte de cette délibération:

LE DIRECTOIRE: délibérant, OUI l'agent national, considérant que Martin FERRON sçut servir en qualité de soldat sa patrie dès qu'il en a eu la force, il fut l'un des premiers comme électeur à renverser le despotisme et à concourir à fonder la République, à combattre les armes à la main les ennemis avec autant de courage que de fermeté, dans le Conseil de l'Administration dont il a été toujours membre, ses avis d'une sagesse et d'une prudence au dessus de son éducation furent admirés et suivis de ses confrères.

Commandant de la garde nationale du canton de Saint-Julien de Vouvantes s'est montré digne de l'emploi auquel il a été appelé de ses concitoyens. Dans son domestique, vertueux il fut bon mari, bon père, bon voisin, l'ami du peuple respecté des ses ennemis qu'il traitait avec humanité lorsqu'ils étaient en son pouvoir. Si à ces traîtes Martin FERRON a succombé victime de son amour paternel, par le fer d'assassins qui ne mettent aucunes bornes à leur férocité. "

 Le même 6 thermidor Jean GAUTIER (père) métayer à la Noë-Faisant et cousin germain de Martin FERRON, sur dénonciation du patriote Joseph MITAILLE, fut arrêté comme fanatique. Il décédera le 6 vendémiaire an III (29 septembre 95) dans un hôpital de Nantes. A ce sujet voici la lettre de RAIMBAU T commandant à Erbray à MARES commandant à Chateaubriant :

"Ce qui t'étonnera peut-être c'est que ce scélérat, Jean GAUTIER, à été nommé à différentes fonctions que sa conduite eut dû empêcher; mais tu seras désabusé, quand tu apprendras que peut-être dans les autorités constituées de cette commune, on ne peut nommer trois républicains, que dans cette même commune composée de mille feux, il n'en existe pas vingt qui sont obligés de fuir pour éviter les cruautés qu'exerceraient sur eux les scélérats.

 Si d'après la loi, on punissait tous les coupables d'Erbray. 0 certes ils seraient nombreux Mon devoir, mon Républicanisme m'engage à te dénoncer les coupables c'est pourquoi je te le dénonce sur plainte de MITAILLE."

(Voir lettre MARES annexe XII)

 

Précédant le drame de la Rousselière et après l'assassinat d'Ambroise HOGUEREL les comités de surveillance de Petit-Auverné et d'Erbray avaient adressé le 26 messidor (16 juillet) leurs délibérations, aux membres du Tribunal criminel de Nantes par l'intermédiaire du district. En voici la teneur :

"Nous vous adressons ci-joint un extrait des délibérations du comité de surveillance de la commune de Petit-Auverné relative à l'arrestation de Jean BARBELIVIEN et Marie MORISSAUX sa femme.

Une autre délibération du comité de surveillance de la commune d'Erbray pour l'arrestation des nommés Jean HENRY, Renée MONDOUET veuve, Jean JOLLIVEAUX, Anne VENGEANT, François DUPAS, Pierre ROUX, Marin PEIGNE veuve de René MORIN, la veuve DERVAL.

Les tous de la commune d'Erbray.

La nommée Allain FERRON femme FRANGEUL et la MIAUD sont aussi du nombre des détenus qui sont conduits à la maison d'arrêt de Nantes, ces deux dernières vous sont envoyées par jugement du Tribunal."

 Quatre jours après le triple assassinat de la Rousselière le 10 thermidor (28 juillet) Julien MARCHAND (42 ans) laboureur au village des Landelles, membre du comité de surveillance, est à son tour abattu.

 Tous ces assassinats entraînèrent la garnison de St-Julien à opérer de nombreuses arrestations notamment le 13 thermidor (31 juillet) celles de trois femmes et d'un jeune homme d'Erbray et aussi à entendre beaucoup de témoins. (Voir annexe XI)

 Le 24 thermidor (11 août) on envoie des prisonniers de Chateaubriant à Nantes. Parmi ces prisonniers on relève les noms de Pierre TALOI, René POULAIN, Marguerite ALIX veuve JOUBERT, Jean LAGREE, la veuve GEORGET, Pierre GAREAU, René BIGOT, Pierre CAVALlER, Ambroise POULAIN.

Et malgré ces événements tragiques les réquisitions continuent :

Le 13 thermidor ( 31 juillet) on a exigé de la commune d'Erbray tout d'abord

196 quintaux de blé et de seigle ramenés quatre jours plus tard à 131 qx.

 Le 26 thermidor (13 août) la municipalité doit fournir 70 qx de foin, III qx de paille et 90 boisseaux d'avoine.

On réquisitionne aussi des hommes ainsi le 15 fructidor (3 septembre) on demande 60 hommes qui doivent se trouver prêts pour le lendemain.

 Julien GOBBE ayant donné sa jument à un militaire qui poursuivait les brigands, la municipalité d'Erbray présente au district pour l'indemniser une note de 380 livres.

 Le 17 fructidor (5 septembre) le registre des décès de la commune enregistre celui d'Antoine SEMINEL, volontaire au premier bataillon de Seine­Inférieure, quatrième compagnie, originaire de Rouen, tué par les chouans, le onze de ce mois, sur le Grand chemin, entre l'étang de la Touche et les communs de la Bréjaudaye.

 Ce même 17 fructidor les administrateurs du district, en quête de chaux, écrivent aux officiers municipaux d'Erbray :

"Le service exige de la chaux pour différents travaux, nous avons ordonné à la veuve FERRON d'en faire de suite une fournée ; mais cette dernière nous a observé qu'il lui manquait trois à quatre chartées de bois pour compléter sa fournée, deux ouvriers pour faire cuire la chaux.

Nous vous invitons en conséquence au reçu de la présente à mettre quatre métayers en réquisition pour conduire chacun une chartée de bois au fourneau du lieu qui sera désigné par la veuve FERRON, les citoyens FRANCHET de la Rouxellière et de la Rollandière pour faire cuire la chaux.

vous voudrez bien aussi commander un nombre de chartiers suffisant pour conduire la chaux à Chateaubriant dès qu'elle sera cuite."

 Dans les mêmes temps ces mêmes administrateurs adressent une mise en garde à la municipalité d'Erbray, suite à la plainte d'un commissaire.

"Le commissaire LAMBERT vient de se plaindre que vous lui refusiez un guide pour vaquer à sa commission.

Vous ne pouvez sans vous rendre coupable de l'accompagner tour à tour, ou lui donner un guide pour aller dans tous les villages de votre commune qu'il ne connaît pas et dont il ne connaît aucun citoyen.

Il est de votre responsabilité de lui fournir un guide sans délai.

Les journées que le Commissaire du district passera à ne rien faire faute de guide seront à vos frais."

Le 29 brumaire an III (21 novembre 1794) une nouvelle réquisition exige d'Erbray la fourniture de 46 qx d'avoine.

 En cette période de fin 1794 à début 1795 les officiers composant la colonne mobile stationnée à Chateaubriant sont les suivants :

Commandant LEVRIEU, Capitaine  ANDRIEU, Adjudant-major SCHMITT, Capitaine LECLERCQ, Capitaine  JOIRON, Capitaine PROBSTE, Capitaine BURY, Capitaine  JUMERMANN, Capitaine SOCK, Capitaine TENAILLEU, Capitaine LABERGNERY

Les patrouilles républicaines détachées de leurs garnisons sortent peu la nuit. Pendant le jour, elles s'aventurent un peu plus pour arrêter les personnes dénoncées par des espions à gage à qui il est remis 25 livres pour toute prise de rebelle.

Par contre les chouans s'enhardissent et font de plus en plus d'incursions. Ceux qui se cachent dans la forêt de Juigné exercent leur emprise sur St­Julien, Erbray et Soudan.

Nombre de patriotes se sentant menacés se sont réfugiés à Chateaubriant, d'autres évitent de coucher à leur domicile.

Le 8 frimaire an III (1er décembre 1794), Bertrande OLIETTE 57 ans, aide laboureur de la Faisantière est attaquée à son domicile par trois hommes, assommée et transpercée de coups de baïonnette.

Le 7 pluviose An III (28 janvier 1795) les chouans assassinèrent Catherine CHENUEL à 10 heures du soir à son domicile du bourg.

Pour finir, lors de l'une de leurs inscursions les rebelles de la forêt de Juigné incendièrent l'église d'Erbray.

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